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mardi 1 avril 2014

Pinocchio

Winshluss, Les Requins Marteaux, 2008.

Winshluss se livre dans cette bande dessinée à une revisite du conte Pinocchio.
Si je n'ai jamais lu l’œuvre originelle de Carlo Colodi, publiée en 1881, j'ai été imbibée de l'adaptation qu'en fit Walt Disney et ce sont les séquences du film, les musiques et le nez qui pousse qui ont marqué mon propre imaginaire et sont venues se confronter à l'univers de Winshluss.
Chez lui, le jeune pantin n'est plus de bois mais de fer, la fée a disparu, Jiminy Cricket s'est transformé en Jimmy le Cafard et l'enchantement devient macabre. Mais enchantement il y a...
Si Disney cherchait à apaiser, Winshluss lui vient réveiller, titiller des instincts plus vils, des aspirations insatisfaites.... Le conte a ce quelque chose d'universel, qui sans forcement être dicible, interpelle. La bande dessinée réussit avec brio à trouver là où ça grouille.... Cradingue, le mot vient pour illustrer certaines passages... et pourtant l'ensemble ne tombe jamais dans le salace. Nuances subtiles ? Peut-être ? Nuances personnelles ? Sûrement ... Mais nuances.

Cette bande dessinée est puissante et habilement construite. Les mises en pages alternent, se font face et se font clash, marquant le rythme d'une lecture qui n'a guère d'espace pour se reposer. Sous la forme de feuilleton, l'histoire se déroule. La couleur alterne avec le noir est blanc, d'une page de comics américain, on passe à un spot publicitaire, puis à des croquis de carnet dessiné. Mais ce mélange n'est pas un simple digest, il est articulé.

L'auteur s'amuse avec les genres du roman populaire, avec les codes et les « égéries » de la culture de masse.... La mythologie moderne est à la fois canonisée et dynamitée ! De Charlot à la surfeuse du Pacifique en passant par le détective alcoolique et cynique on retrouve autant de figures de la culture moderne. L'imaginaire enfantin n'est pas en reste. Blanche Neige en prend pour son grade tandis qu'un personnage aux traits pas si lointain des Katzenjammer Kids rappelle que les enfants se montrent aussi cruels. Sensible peut-être de part ma propre personne, je me suis amusée à voir défiler les visages du féminin.
Et puis il y a en dedans de cela un souffle de romantique, Jimmy le cafard -autre nom du spleen- est un éternel insatisfait, un idéaliste dérisoire. Dictature fanatisme, l'aveuglement revient à maintes reprises...l'œil voyeur, l'œil  qui scrute,  l'œil miroir.
Un conte se donne à lire et à entendre, une bande dessinée se donne à lire et à observer.

Dans cette densité référentielle, la trame narrative est bien là. L'histoire se poursuit, au fil des pérégrinations de Pinocchio, en orbite ou sur la mer, se succèdent les paysages, les personnages et les carnages... un seul instant ses yeux s'éveillent...un seul instant il semble prendre part à la valse du monde...
Petit bonhomme, toujours seul sur la route, il n'en finit pas de marcher...Seul, inexorablement et ainsi, si vraisemblablement humain!
 
détail p.41

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