Être entourée de livres, d'images et de mots et tenter d'en dire quelque chose, de partager...

Garder une trace, vaine intention, peut être... Tant pis...

Un blog à défaut -blogger - (et oui, je cède à la simplicité et je me fais complice de google, tant pis....). Les messages s'affichent des plus récents aux plus anciens...



mardi 27 mai 2014

Volivent

Une fois n'est pas coutume et c'est peu de le dire, 
je voudrais parler de musique.
Deux musiciens, une flûte, une nyckelharpa et onze mélodies folk.

Folk, comme folklore ?
Tradition inventée, amassée, terme politique?
Qu'importe tous cela, ces airs folks m'interpellent.

Au delà du cercle familial, du clan ou de la marge,
Au delà des particularismes,
 il y a quelque chose de plus éminent dans cette musique,
quelque chose de plus "universel", bien que le mot ne soit pas non plus le bon.
A chacun son appropriation, et celle-là me plait.
Certes l'émotion est personnelle, lien intime que je partage.
Mais plus encore, les airs de flûte et de nyckelharpa,
viennent comme le souffle faire vibrer au-dedans, 
et comme le vent incitent le corps au mouvement.
  
A découvrir et en écoute à cette adresse:  http://volivent.bandcamp.com/ 
S'y trouve aussi disponible leur premier album : 
Busking Tour of New Zealand, Volivent, 2014.
 





mardi 20 mai 2014

Le rayon de la mort

David Clowes Édition Cornélius, 2010.

Quand les super-pouvoirs se tirent à coup de lattes et que la mort sort d'un gadget, bien dérisoire semble le reste. C'est une histoire de super héros, où l'on cherche tout autant le super que le héros.

Le ridicule n'est pas de mise, cela est bien sérieux, voire grave, mais pas assez pour s'empêtrer dans un discours uniquement sociologique. Les canons d'une certaine culture américaine que certains diront populaire, sont traqués, détournés, infiltrés par l'auteur qui se les approprie. Par eux, il donne corps, forme et densité à son histoire, tant sur le plan graphique que narratif.

Une «middle town», comme il en existe certainement beaucoup d'autres aux États-Unis. Deux ados, et une amitié qui naît, ado rêveur, ado chi...r et puis, l'irruption inattendue d'une force extraordinaire. Voila le jeune Andy mué en invincible, résolu à lutter pour le bien celui de la communauté. Mais, zut ! Où se traque le mal, quand jamais rien ne se passe? L'obsession sécuritaire se montre contre-productive... et la vie continue de couler.

Tic tac, les heures passent et puis les années passent. Par là une amourette et par çi une castagne, par ici l'ami et par là l'amant, et puis les jeunes, les vieux, les blancs, les noirs.... Mal Aise, espoir et désuétude.

La lecture est rythmée par les nombreux portraits qui s'esquissent - au lecteur d'imaginer la suite. Du pop au rock en passant par le punk, la musique ne cesse d'être présente, l'auteur parvient à créer une texture musicale, les yeux percevant presque le grésillement des transistors! En parallèle, l'alternance graphique des séquences renforce le plaisir de tourner les pages. C'est amusant, divertissant et indéniablement bien construit. Le tout est maîtrisé, presque trop impeccable, et cependant non loin de là, la mauvaise graine...toute proche la fissure...

mardi 13 mai 2014

L'homme de mes rêves

Nadja, Cornelius, 2010

«Ferme les yeux et dis quelque chose. N'importe, un chiffre, un prénom. Comme ceci (elle ferme les yeux): Deux, deux quoi ? Deux femmes.»

L'une est dans l'histoire, la seconde la dessine et rajoutons ici, celle qui tourne les pages.
La première a les cheveux noirs, de grands yeux et quelques traits suffisent à dessiner son corps de femme. Un corps abîmé par la brutalité d'un homme. De ses deux mains, elle ne sait pas quoi faire, hésitant entre le crayon et le pinceau. Ses pensées, sombres parfois, souvent s'évadent. Et puis un jour, la fuite. Mais où ? Le personnage autant que le lecteur se pose la question. Mais où ? Mais qui ? Au fil du scénario des réponses s 'ébauchent et le titre un tantinet fleur bleue, s'élucide.

Ce n'est pas la première histoire que je lis de Nadja. Il y a, lointain souvenir, un livre trônant dans la bibliothèque de l'école, un grand chien bleu au regard interrogateur. Et puis plus récemment, les conseils d'une personne m'ont fait ouvrir une bande dessinée de l'auteur. Sans cela, je serais certainement passée à côté, rebutée par les dessins qui au premier regard ne me parlent guère. Comme le jeu de couleurs choisi, ils sont presque enfantins et les traits sont épais. Cependant, une fois entrée dans l'histoire, ils se révèlent paradoxalement appropriés. Résurgence de l'enfance ? Illusion d'adulte ? Rêve sempiternel ? A chacun son histoire.

« Qui suis-je? Si par exception je m'en rapportais à un adage: en effet pourquoi tout ne reviendrait-il pas à savoir qui je «hante» ? Je dois avouer que ce dernier mot m'égare, tendant à établir entre certains êtres et moi des rapports plus singuliers, moins inévitables plus troublants que je ne pensais. Il dit beaucoup plus qu'il ne veut dire, il me fait jouer de mon vivant le rôle d'un fantôme, évidemment il fait allusion à ce qu'il a fallu que je cessasse d'être, pour être qui je suis. »
Première ligne de Nadja, roman d'André Breton dont sont aussi tirés les mots du haut.

Citations tirées de l'édition Gallimard, 1963, respectivement p.87 et p.9.

mardi 6 mai 2014

Apprendre à finir

 
Laurent Mauvignier, Les éditions de minuit, 2004, 126 p.
Paru la première fois en 2000.






D'une découverte d'un livre à une lecture.
Itinéraire partagé.


Trouver ce que l'on ne cherche pas. C'est là, un des plaisirs de la recherche. Dans les rayons de la bibliothèque, je cherchais un roman, pas celui-ci.  
«Apprendre à finir» a stoppé net mon regard sur les étagères. Le titre évocateur a fait résonances ... quelque part. Je ne connaissais pas l'auteur, en le prenant dans les mains, j'ai déjà vu l'image de couverture.

La maison rouge de Casimir Malevich. Ce tableau me plaît. Il y a un horizon à la fois simple et nu et pourtant majestueux. Il y a cette maison. Fermée du derrière, je l'imagine béante à revers, absorbant la chaleur du soleil, la fugacité du vent, ouverte sur l'espace sans limite. 
Cependant, apprendre à finir.

Ne lisant pas les quatrièmes de couverture, je regarde en revanche, chaque fois, la liste des publications précédentes de l'auteur. Ce n'est le premier roman de Laurent Mauvignier. Avant, il y a eu « Loin d'eux », et puis ensuite, sont venus «Ceux d'à côté», «Seuls», «Le lien», «Dans la foule», «Des hommes». Autant de titre, pour se situer, pour s'attacher.
C'est décidé, je l'emprunte, son petit format, un peu plus de 100 pages, me convainc davantage...ce n'est déjà plus la peine.
                                        

Lu, une fois encore sur les rails, entre deux points, non située. La narration, elle, est toute focalisée. Elle concentre un discours intérieur, unique et douloureux, celui d'une femme qui doute et qui souffre. Elle raconte les déchirures d'un être, d'un corps, d'un couple et d'une famille. Parcours accidentés, c'est aussi l'histoire de guérisons volontaire et défaitiste. Celle d'un corps que se meut; celle d'un esprit qui s'éclaircit. La chair autant que les pensées sont livrées au lecteur par une écriture sensorielle et mentale. Les mots assènent, reflètent un monologue lancinant. Ils cherchent à s'extirper, mais dans la page, entre les virgules, dans la tête, insidieusement ils sont contenus.
Rumination entêtante, phrase après phrase, la lecture fait mal. C'est là que l'auteur touche le lecteur. De celui-ci, il n'en fait pas un voyeur, mais le rend mal à l'aise. Ni au dedans de cette femme, ni à côté, on ne veut être nulle part. Les phrases sont longues, on cherche à respirer, on cherche à s'échapper. Sans issue ? 
Et pourtant apprendre à finir. 

La maison rouge, Casimir Malevich, 1932